C’était une soirée comme une autre qui se profilait à l’horizon. Et comme tous les autres soirs, je comptais bien m’amuser et passer du bon temps, en compagnie. Je n’avais pas envie d’échouer dans une boite de nuit qui serait trop blindée à mon goût, en ce début de week-end. Raison pour laquelle mon choix se porta plutôt sur un casino. Le Bellagio serait parfait pour la soirée ! Le jeu il n’y avait rien de mieux pour s’amuser vraiment et penser un peu à « autre chose ». Avec un peu de chance, j’allais gagner un peu d’argent et pouvoir, ainsi, renflouer les caisses qui étaient déjà bien garnies par mon père lui-même. Il lui arrivait encore, de temps à autre, de se souvenir qu’en tant que père, il était censé me pousser à travailler ou au moins à reprendre mes études. Du coup, il m’en touchait deux mots … Mais abandonnait bien vite devant mon manque d’entrain. Pourquoi travailler quand on a tout l’argent dont on a besoin pour vivre ? Il savait que la seule façon de me secouer, serait de cesser de me donner de l’argent que je n’avais pas gagné par mes propres moyens. Mais il ne pouvait pas s’y résoudre. J’étais sa petite fille chérie et il n’avait jamais su me refuser quoi que ce soit. Sans doute aidé en ce sens, par une certaine culpabilité. Celle de n’avoir jamais été vraiment là, dans ma vie et à mes côtés. Il s’en était surtout rendu compte, le jour où il avait réalisé que j’entretenais une relation secrète, avec mon frère adoptif. S’il avait été davantage ici, il s’en serait sans doute rendu compte plus tôt. Quoi qu’il en soit, je m’en foutais un peu. J’aimais la vie que je menais à présent. Et pour rien au monde je n’aurais voulu la changer. Qu’on se le dise !

Ce fut à la perspective de cette soirée parfaite, que j’enfilai l’une de mes robes préférées. Un long fourreau de soie et de dentelle, rouge. Le décolleté en V était plongeant et descendait jusque sous ma poitrine à peine dissimulée. Et le dos était de dentelle, de part et d’autre de la longue fermeture éclair invisible. La robe était moulante jusqu’à mon bassin, avant de tomber plus librement, jusqu’à toucher terre. J’enfilai ma paire de chaussures à hauts talons, rouge, pour que le tissu se contente de frôler le sol. Je l’avais faite faire sur mesure, quelques semaines plus tôt. Et ce n’était que la seconde fois que je la mettais. J’avais tendance à ne pas porter souvent le même vêtement et à m’en lasser assez rapidement. Pour mes cheveux, je me contentai de les ramener légèrement en arrière et de les faire tenir à l’aide d’épingles à cheveux, savamment dissimulées. Une touche de fond de teint pour unifier mon visage, un peu de fard à paupière pour les assombrir, du mascara, un peu de blush et enfin, je misai le tout sur un rouge à lèvre aussi rouge que ma robe. Je ne pris qu’un petit sac en bandoulière, pour y ranger le stricte nécessaire, avant de quitter mon logement, pour rejoindre une amie, avec laquelle j’allais souvent en soirée. Quand nous fûmes arrivées, nous nous installâmes ensemble, à une table de poker. Je parlai avec mon amie en m’installant, sans avoir remarqué le croupier.

Il y avait pas mal de choses qui ne se faisaient vraiment pas. Question d'étique, de savoir vivre ou de politesse. Parfois, plusieurs de ces points. Des exemples ? Ca ne se faisait pas de manquer de respect aux personnes âgées. On ne doublait pas dans les files devant les cinémas ou les fast food. On ne rote pas à table, on ne mange pas la bouche ouverte, on ne dit pas de gros mots devant les enfants, on ne court pas dans un magasin, on ne part pas sans payer, on ne se moque pas des handicapés, on ne traite pas les vieux de 'vieux débris' et on ne couche pas avec son frère. Ca, ça fait bel et bien parti de toutes les choses à ne surtout pas faire. Et pourtant ... Pourtant, j'étais de ces gamins qui se pensaient tout permit et qui faisaient toutes les choses que je venais d'énumérer, et tant d'autres encore. Je faisais ce que bon me semblait, quand bon me semblait. Pourquoi ? Parce qu'avec un père comme le mien, j'avais pris la fâcheuse habitude de tout ça. Parce que depuis toujours, j'étais persuadée de bel et bien avoir le droit de faire tout ça si ça me chantait. Alors je le faisais. Je faisais tout ! Mais ça ne me rendait pas heureuse pour autant. Je ne manquais de rien, je pouvais tout me permettre tout en sachant les limites à ne pas franchir pour ne pas finir derrière les barreaux. Et finalement ... Ca rendait ma vie lassante et ennuyeuse. C'était peut-être un peu pour ça, que j'avais commencé cette relation secrète avec mon frère. Certes, j'en étais tombée amoureuse. Mais le fait de vivre une relation en cachette, doublait le plaisir ressentis à vivre une histoire d'amour.

Mais tout ça était sans importance. Parce que ce soir j'étais bien décidée à m'amuser. Et ce, en m'installant à une table de poker, en compagnie d'une excellente amie. Sauf que le son d'une voix que je ne connaissais que trop bien, me fit redresser la tête. Se pouvait-il vraiment que Logan soit ici ce soir ? Un simple coup d'oeil me suffit à constater que oui. Et le regard de mon amie venait de suivre le mien. "Logan ... Evermoore ..." Finis-je par lâcher, sur un ton plus surpris qu'autre chose. Je regardai autour de nous et ne mis guère longtemps avant de comprendre qu'il travaillait ici. "Croupier ? Sérieux ?" Ne pus-je m'empêcher de dire. Pour un homme qui avait été promit à un brillant avenir de PDG, c'était une sacré différence.

Dès le départ, mon père avait été intimement convaincu, qu'il pourrait redresser un voyou comme Logan, pour faire de lui un honnête homme d'affaire, plus tard. Il se foutait alors totalement de son passé, de ses origines, de ce qu'il pourrait bien devenir au vu de son hérédité. Il ne craignait pas qu'il puisse devenir un alcoolique qui battrait ceux qui pourraient compter pour lui. Parce qu'il était certain qu'il saurait lui apprendre les valeurs qu'il avait lui même et le rendre bon et sérieux. Sauf que Logan, dès son arrivée chez nous, s'était montré totalement récalcitrant et renfermé sur lui même. Silencieux et apparemment désireux de mener sa petite vie comme bon lui semblait. Il fumait ce que bon lui semblait, où bon lui semblait et faisait même ce qu'il avait envie de faire, de toute évidence. Et personne n'avait apparemment eut le pouvoir de le faire changer de comportement. Personne à part moi. Parce qu'au fil du temps et à force de se voir pour coucher ensemble en cachette, il avait apprit à se livrer à moi. J'en avais appris plus sur lui et j'avais su qu'il ne serait jamais un homme comme son père. Au plus profond de lui, il voulait devenir quelqu'un de bon. Celui que mon père lui même forgerait au fil du temps. Sauf que pour ça, il aurait fallut qu'il ne transgresse pas l'une des règles les plus importantes. Celle de ne pas toucher à la fille de celui qui l'avait accueillit. Qu'il ne touche pas à la petite princesse. Sa propre soeur d'une certaine façon. Même si ce n'était aucunement par le sang. Et fort heureusement d'ailleurs ! Je n'avais jamais été capable de le considérer comme mon frère. Parce qu'on ne peut désirer quelqu'un avec qui on a un tel lien. Il n'était pas mon frère mais mon amant. Et accessoirement, il portait le même nom que moi.

Et ce soir là, alors que je retombais nez à nez avec l'homme que j'avais un jour aimé et pour lequel j'avais sans doute toujours des sentiments, je ne savais plus que faire ni que penser. Aux yeux de la loi, il était toujours mon frère. Et à vrai dire, je ne savais même pas ce que je désirais. Lui ? Oui, lui. C'était l'évidence. Sa voix coupa mes réflexions. Il terminait dans dix minutes ... Et il m'était impossible de ne pas entendre l'invitation à peine voilée derrière ses mots. J'affichai un sourire à la fois ravi et innocent, alors que je lui adressais un vague clin d'oeil coquin. "Que tu es présomptueux grand frère..." Soufflai-je d'une voix douce, en souriant de façon vaguement moqueuse. Sans ajouter un mot, pas même pour lui dire si je serais là ou non à la fin de sa soirée de travail, je quittai la table et m'éloignai avec mon amie. Toutefois, nous n'allâmes pas bien loin, puisque je pris soin de le garder dans mon champ de vision. Dix minutes plus tard, alors qu'il était l'heure pour lui de quitter sa table, j'abandonnai mon amie et m'éloignai, pour l'attendre dans un coin de la salle, non loin de l'entrée du casino.

Il y avait certaines choses que je n'étais pas capable d'oublier. Comme le goût des lèvres de Logan. Ou son odeur si ... Lui. Tout comme la douceur de sa peau contre la mienne. Nos baisers enflammés, nos moments rien que tous les deux enfermés dans sa chambre ou dans la mienne. Nous avions agis sans jamais penser aux conséquences. Et je ne pouvais pas dire que je le regrettais. Parce que ce n'était pas le cas du tout. Tout au contraire même. J'avais aimé chaque instant que nous avions partagé tous les deux. J'avais aimé cette entente entre nous, ce besoin continuel d'être ensemble, cet amour qui avait éclot et s'était développé. Et pourtant, je savais que tout ça n'était pas vraiment autorisé. Je n'étais pas assez idiote pour croire que ça pourrait durer éternellement. Oui, j'étais tombée amoureuse de mon frère. Mais j'étais encore consciente du fait que nous allions finir par être découverts. Et c'était bien ce qui était arrivé. Mon père était arrivé au plus mauvais moment qui soit. Il nous avait surpris alors que nous étions sur le point de passer encore une fois à l'acte. Et évidemment, il nous avait séparés, avait mit Logan dehors ... Et ce fut la fin de l'histoire. Je m'étais sentis détruite et trahit par lui et sa décision. Il avait beau être mon père, je n'acceptais pas qu'il s'immisce à ce point dans ma vie. Après tout, j'étais déjà assez grande à l'époque, pour prendre mes propres décisions. Et puis ce n'était pas comme si Logan était dans ma vie en tant que frère, depuis des années et des années. Il n'était là que depuis peu encore. Alors forcément, je ne pouvais pas le considérer comme étant mon frère. Et maintenant que je venais de le retrouver dans ce casino, je réalisais que les choses n'avaient pas du tout changées. Toujours cette envie de s'appartenir et cette incapacité à se voir comme un frère et une soeur. Est-ce que je l'aimais toujours ? Je ne le savais même plus.

Comme il finissait dix minutes plus tard, je n'hésitai pas à décider que j'allais simplement l'attendre. Nous avions du temps à rattraper lui et moi. Même si je savais que notre relation ne pourrait pas repartir d'aussi bon pied qu'auparavant et qu'il nous faudrait du temps et beaucoup de discrétion, pour faire quoi que ce soit. Dix minutes plus tard, comme prévu, je le vis fondre sur moi. Et à peine fut-il à ma hauteur, qu'il se pencha pour m'embrasser. J'eus tout juste le temps de répondre à son baiser, avant qu'il ne se redresse. Je soupirai doucement d'aise devant ses paroles et j'affichai un sourire ravi, presque malgré moi."Je propose que l'on continue cette intéressante conversation ... Ailleurs ..." Plaisantai-je d'une voix douce, avant de me rapprocher de lui, pour capturer ses lèvres des miennes. Un chaste baiser qui prit rapidement fin, avant que je n'attrape sa main pour l'entraîner hors du casino."Où est-ce qu'on va ?" Lui demandai-je en me retournant vers lui, pour l'observer. Je n'étais pas encore tout à fait revenue de ma surprise, de l'avoir retrouvé.